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Full text of "Un "Auto" inedit de Valdivielso"

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The  EDITH  and  LORNE  PIERCE 
COLLECTION  of  CANADI ANA 


Queen's  University  at  Kingston 


UN  «AUTO  INEDIT  DE  VALDIVIELSO 


Au  mois  d'octobre  1616,  rimperiale  cite  de  Tolede  etait 
en  fete.  La  chapelle  de  Nuestra  Senora  del  S.igrario,  pro- 
jetee,  a  la  fin  du  xvie  sieele,  par  le  cardinal  Don  Gaspar 
de  Quiroga,  commencee  sous  le  court  archiepiscopat  de 
l'archiduc  Albert  d'Autriche,  venait  d'etre  terminee  par  le 
cardinal-archeveque  Don  Bernardo  de  Sandoval  y  Rojas, 
oncle  du  fameux  due  de  Lerma.  Philippe  III  avait  pro- 
mis  d'assister  a  Inauguration  solennelle  du  sanctuaire.  II 
arriva,  en  effet,  le  mercredi  26  octobre:  Cast  al  anochecer 
entro  Su  Magestad  en  coche,  con  el  Principe  y  los  Infante* 
don  Carlos  y  dona  Maria,  sin  gnarda  ni  acompanamiento 
publico,  que  asi  quiso  favorecer  la  lealtad  de  Toledo.  Le  len- 
demain,  le  jeune  princesse  Elisabeth  de  Bourbon,  mariee 
depuis  un  an  au  futur  Philippe  IV,  faisait  a  son  tour  son 
entree  en  un  palafren  bianco,  con  gualdrapa  y  aderecos  de 
terciopelo  negro,  bordado  todo  rico  de  florones  de  plata,  ojuela 
brillante  de  relieve,  sillon  de  plata,  lacayos  con  su  librea 

Les  fetes  durerent  seize  jours,  du  jeudi  20  octobre  au 
jeudi  4  novembre.  La  relation  nous  en  a  ete  conservee  en 
un  livre  extremement  curieux,  auquel  j'emprunte  les  cita- 
tions ci-dessus,  et  dont  voici  le  titre  exact:  Descripcion  de  la 
capilla  de  N.a  S.a  del  Sagrario  que  erigio  en  la  S.ta  Iglesia 
de  Toledo  el  III™0  S.or  Cardenal  D.  Bernardo  de  Sandoval 

y  Kojas Por  el  Lic.do  Pedro  de  Herrera:  Madrid,  Luis 

Sanchez,  1617,  4.0 

Arcs  de   triomphe,   mascarades,   carrousels,   illumina- 


58  L.    ROUANET 

tions,  feux  d'artifice,  aucune  des  rejouissances  accoutu- 
m6es  a.  cette  epoque  et  depuis  ne  fut  epargnee.  Hubo  toros, 
hubo  caiias,  pour  employer  une  formule  traditionnelle.  Et 
Ton  se  garda  bien  d'oublier  le  Certamen  poetico,  comple- 
ment indispensable  de  toute  fete,  et  la  comedie,  dbnt  se 
montraient  si  friands  les  Espagnols  du  xvne  siecle.  Le  di- 
manche  3o  octobre,  dans  la  matinee,  la  Sainte  Image 
fut  conduite  processionnellement  a  son  nouveau  temple. 
L'apres-midi,  en  face  de  la  cathedrale,  des  treteaux  furent 
dresses.  Por  la  tarde,  entre  las  cams  del  Cardenal  y  del 
Ayuntamiento ,  la  compania  de  Cebrian  represents  dos  Autos 
del  Maestro  Joseph  de  Valdivielso.  Uno  de  la  Descension  de 
Nuestra  Sehora  d  dar  la  casulla  a  San  Ilefonso;  otro,  de  la 
milagrosa  aparicion  de  la  Imagen  Santa  del  Sagrario,  des- 
pues  de  aver  estado  escondida,  como  se  he,  dicho.  Vieronlos  sic 
Magestad  y  Altezas  de  las  primer  as  rejas  del  Cardenal:  fue- 
ron  de  mucho  gusto,  por  el  argumento  tan  destos  dies,  y  por 
los  bayles  y  saynetes  con  que  aquella  compania  regozija  sus 
actos  comicos  (0. 

De  ces  deux  autos,  le  deuxieme  reste  inconnu;  tout  au 
moins  n'en  ai-je  pas  trouve  trace.  Le  premier  est  men- 
tion ne  dans  le  Catdlogo  del  teatro  antiguo  espanol,  de  La 
Barrera,  pag.  41 5,  d'apres  un  ms.  ayant  appartenu  a  la 
bibliotheque  du  due  d'Osuna;  aujourd'hui  a  la  Biblioteca 
nacional  de  Madrid  (Res.  6.a,  56).  Mais  le  savant  biblio- 
graphe  a  ignore  a  quelle  date  et  en  quelle  circonstance 
cette  piece  fut  representee. 

C'est  le  licencie"  Francisco  de  Rojas  qui  a  ecrit  de  sa 
main  la  copie  que  possede  la  Biblioteca  Nacional.  Elle 
porte  le  titre  suivant:  Auto  famoso,  de  la  Descension  de  nra 
sehora,  en  la  \    santa  yglesia  de  Toledo,  quando  trujo  la  ca- 

(1)  Description  de  la  capilla  de  N.*  S.«  del  Sagrario,  folio 
88  vuelto  — Au  sujet  de  Cebrian,  on  trouve  la  note  suivante  dans 
le  ms.  Fj,  3-4  de  la  Biblioteca  nacional  de  Madrid.  Pedro  Ce- 
brian. Fue  autor  de  comfania  de  las  de  tilulo  en  el  bienio  tea.tr al 
de  16 1 5  a  1 61 7.  Su  compania  es trend  la  comedia  de  Enciso,  Los 
Medicis  de  Florencia. 


UN    AUTO    1NEDITO    DE    VALD1V1ELSO  59 

sulla,.al  J  gloriossissimo  san  ilefonso,  su  santo  Argobispo,  y 
Patron  \  nuestro  \  compaesto,  par  mi  setior  y  grande  Amigo, 
el  M.°  Joseph,  de  \  Valdiuieso,  que  ay  a  gloria=y  trasladado 
por  mi  el  licen.do>  \  fran.co,  derroxas=para  mayor  hour va  y 
gloria  de  Dios  y  de  \  su  benditissima  madte=virgen  antes 
del  parto,  en  el  parto,  \  y  despues  del  parto,  y  siempre  vir- 
gen=virgen,  congebida,  sin  J  peccado  original =apesar  de  los 
erejes  traydorts.  A  la  fin:  en,  21,  de  margo,  sdbado,  gerca  de 
la  I  vna  del  m.°,  dia;  Anot  de  1643,  anos-^dia  del  glorioso 
san  Benito -^-le  acabe  \  ^-de  trasladar  '—  Plus  bas:  4-  sub 
corr.e  ss.ta  -j- 

Un  autre  Auto  de  Nuestra  Sefiora  y  el  glorioso  San  Ilde- 
fonso,  attribue  a  Lanini  par  La  Barrera  et  par  le  catalo- 
gue de  la  Biblioteca  Nacional  (YJ/-448)  n'est  lui-meme 
qu'une  nouvelle  copie  de  l'ceuvre  de  Valdivielso. 

YJAuto  de  la  Descension,  a  le  lire  attentivement,  presen- 
te  tous  les  caracteres  d'une  piece  de  circonstance.  L'au- 
teur  ne  s'est  guere  preoccupe  de  nouer  une  intrigue  suivie. 
II  a  pris  dans  la  legende  de  saint  Jldefonse  les  trois  episo- 
des principaux:  debat  contre  les  heretiques,  apparition  de 
sainte  Leocadie,  descente  de  la  Vierge,  et  les  a  relies  entre 
eux  par  des  scenes  vives,  plaisantes,  d'une  forte  saveur 
populaire,  et  qui  durent  plaire  singulierement  au  public 
reuni  sur  la  place  del  Ayuntamiento. 

Florindo  et  Braulio,  les  deux  heretiques  disciples  de 
Pelayo,  demandent  a  la  nuit  de  cacher  leur  presence.  lis 
s'avouent  vaincus  par  les  arguments  d'lldefonse,  mais  ils 
desirent,  avant  de  quitter  le  sol  toledan  et  de  regagner 
la  France,  assister  aux  fetes  religieuses  qui  vont  avoir 
lieu.  Deguises  en  pelerins,  ils  esperent  assister  sans  dan- 
ger a  la  procession,  voir  leroi,  les  femmes,  la  chapelle  de 
Santa  Leocadia  de  la  Vega.  Mais  les  gamins  de  la  ville, 
ayant  a  leur  tete  Moscon,  incorrigible  biedouilleur  de  la- 
tin macaronique,  parcourent  rues  et  places,  rouant  de 
coups  quiconque  n'acclame  pas  le  nom  de  Marie.  Les  deux 
mecre'ants  doivent  s'ex£cuter  comme  les  autres. 

Dans  la  Vega,  a  la  porte  de  la  chapelle,  deux  hallebar- 


6o 


L.    KOUANET 


diers  sont  de  garde.  Jaloux  de  leur  consigne,  ils  refusent 
le  passage  au  clerge,  aux  croix,  aux  bannieres.  L'arrivee 
du  roi  et  de  l'archeveque  peut  seule  avoir  raison  de  leur 
farouche  entetement.  Les  deux  heretiques  entrent  aussi, 
meles  a  la  foule,  et,  au  moment  ou  tout  le  peuple  est  en 
prieres  devant  le  tombeau  de  la  sainte,  la  dalle  se  souleve, 
et  Leocadia  apparait  cubierta  con  un  veto  de  plata,  una  crnz 
en  la  mano  derecha  y  en  la  otra  una  palma.  Elle  prononce 
un  long  romance  dont  voici  les  premiers  et  les  derniers 
vers: 


Ildefonso. 


Por  ti;  o  ylefonso  bibe 
la  reyna  nra  sefiora 
la  mad  re  de  Dios  Maria 
la  que  es  madre  y  virgen  sola, 
por  ti  la  estrella  del  mary 
a  qui  en  encrespadas  olas 
escurecer  pretendieron, 
resplandece  mas  hermosa 
a  tu  erudicion  y  pluma 
se  constituyc  deudora 
y  confesa  que  te  deve 
pues  se  la  has  dado,  la  honrra. 


Nra  senora  la  Reyna 

la  que  en  todo  excede  a  todas 

sol  dela  virginidad 

y  de  la  velleca  sola 

a  visit  arte  me  embia 

de  su  parte,  y  ella  propia 

codicia  el  venir  a  verte 

porque  el  cbracon  la  robas 

espera  mayor  ventura 

y  que  entre  flores  y  aromas 

luceros,  soles  y  dias 

pises  cielos,  goces  glorias 

quedate  adios  padre  mio. 

O  velo,  yelo  del  cielo 

por  manos  texido  hermosas 

que  sutil  transparentaste 

de  marfil  la  virgen  goda. 


UN    AUTO    1NEDITO    DE    VALDIVIELSO  Ol 

Sol  fue  leocadia,  sol  es, 
y  sol  que  al  del  cielo  dor  a 
y  si  se  puso,  que  mucho 
que  nos  dexase  a  su  sombra. 
Rev.  El  velo  con  el  cuchillo 

en  el  sagrario  se  ponga 
en  fe  de  tan  gran  milagro 
para  perpelua  memoria . 

Ou  pourra  juger,  d'apres  cet  extrait,  du  style  de  l'oeuvre 
et  comparer  cette  scene  a  d'autres  analogues,  de  divers 
poetes. 

La  procession  sort.  Florindo  et  Braulio  se  declaren 
convertis  par  ce  miracle.  Des  pauvres  accourent  recevoit 
Taumone  quotidienne  qu'on  leur  distribute  par  les  soins 
d'lldefonse.  lis  forment  un  curieux  assemblage  de  gueux 
de  toute  sorte,  parmi  les  quels  se  distihguent 

El  que  tulle  y  manca  ninos, 
hace  11  a  gas  y  abre  piernas, 

et  Taveugle  chanteur  de  complaintes  qui  vient,  sans  per- 
dre  de  temps,  d'en  composer  une  sur  le  miracle  de  sainte 
Leocadia. 

Udefonse,  rentrant  dans  l'eglise,  recoit  la  confession  de 
Florindo  et  de  Braulio.  Quant  a  Pelayo,  qui  persiste  en 
son  heresie,  Tange  de  la  justice  le  foudroie  de  sa  lance.  Le 
saint  archeveque  s'agenouille  en  extase  devant  l'autel. 
Une  pauvre  vieille,  qui  assiste  a  matines,  voit  avec  effroi 
et  admiration  la  Vierge  s'avancer,  entouree  des  legions  ce- 
lestes, la  chasuble  entre  ses  mains.  Elle  refuse  de  rendre 
le  cierge  qu'un  ange  lui  avait  distribue  pour  solenniser  le 
miracle,  et  le  garde  pour  eclairer  Theure  de  sa  mort.  Ou  a 
pris  naissance  cette  douce  et  touchante  legende?  En  Fran- 
ce elle  apparait  d€ja  dans  une  composition  dramatique  du 
XI ve  siecle:  Cy  commence  un  Miracle  de  Nostre-Dame,  com- 
ment elle  gar  da  une  femme   d'estre  arse  (0.  En   Espagne, 


(i)     Theatre  francais  au  Moyen-Age,  publie  par  MM.  Mon- 
merque  et  Francisque  Michel:  Paris,  Firmin  Didot,  i885,  pag.  327. 


62  L.    ROUANET 

Lope  de  Vega  et  le  peintre  Murillo  l'ont,   a  l'exemple  de 
Valdivielso,  mel6e  a  la  legende  d'Udefonse. 

Apres  que  la  Vierge  est  remontee  au  ciel,  V auto  se  ter- 
mine  sur  ces  beaux  vers  du  saint  prelat: 

Despues  de  averos  visto,  que  me  quedct 
en  la  tierra  que  ver,  o  veldad  alma 
hasta  bolver  a.  veros,  con  que  pueda 
los  ojos  consolar,  quietar  el  alma. 


Comme  on  peut  s'en  rendre  compte  par  cette  rapide  ana- 
lyse, VAuto  de  la  Descension,  quoique  tres  mouvemente, 
est  tres  simple  en  somme  et  ne  meriterait  peut-etre  pas 
une  mention  particuliere,  s'il  n'etait  la  premiere  en  date 
de  plusieurs  pieces  ecrites  sur  le  meme  sujet.  Lope  de  Ve- 
ga s'en  est  evidemment  inspire  pour  ecrire  le  troisieme 
acte  de  El  capellan  de  la  Virgen,  publie  quelques  annees 
plus  tard  dans  sa  Parte  XV III:  Madrid,  Juan  Goncalez, 
i623.  Dans  le  premier  acte  de  La  Virgen  del  Sagravio,  de 
Calderon,  l'imitation  semble  moins  evidente.  Neanmoins, 
Vauto  de  Valdivielso,  par  suite  des  circonstances  dans  les- 
quelles  il  fut  represente,  dut  avoir  en  Espagne  un  certain 
retentissement  et  une  influence  sur  les  ceuvres  similaires. 
Et  c'est  a  ce  point  de  vue  qu'il  m'a  paru  interessant  de  le 
signaler  en  ces  lignes.